Ingrid Ulrich - Quand l'extraordinaire est ordinaire
Bonjour Ingrid, peux-tu te présenter ? (Age, là où tu vis, parcours perso, surnom, job…)
Hello ! Oui donc “Ingrid” j’aime pas trop, ça fait trop sérieux. Mes amis m’appellent “Grid” et pour mes amis du Nord dont je suis originaire c’est plutôt “La Grid”, ça fait plus rustique 😉 J’ai 41 ans, maman de 2 filles et en théorie je suis prof en lycée. Mais pour l’instant mon job c’est exterminateur de crabe (cf : cancer).
Comment as-tu découvert le SUP et qu'est-ce qui t'as plu ?
J’ai découvert le SUP dans un moment difficile de ma vie (Blog : www.lesaventuresdelagrid.com). J’habitais une péniche sur le Canal du Midi. Je voyais des SUP passer régulièrement et cela me faisait rêver de les voir glisser sur l’eau.
C’est simple si je devais résumer ce qui m’a plus dans le SUP c’est : LA LIBERTE et la satisfaction de faire quelque chose moi-même.
Le SUP permet d’aller où l’on veut, quand on veut et à la seule force de ses bras : c’est indescriptible comme sensation ! Et je ne parle même pas des sensations que l’on peut ressentir en surfant une vague, c’est juste magique !
Tu pratiques autant en mer qu’en rivière, quelles sont les principales différences ?
Il faut savoir lire une rivière, elle peut être très dangereuse alors qu’a première vue rien ne l’indique. On y trouve des siphons, des rappels, des contre-courants, des marmites, des drossages, des rapides, etc. Pour un pagayeur (SUP, Kayak, canoé...), le rappel est la première cause de noyade. Scotché au fond, impossible de remonter à la surface et c’est la noyade. Les rivières sont classées sur une échelle de 1 à 6 selon leur difficulté (de facile à extrême). Une rivière n’est jamais la même, selon la saison, la météo, son débit, son niveau d’eau... Il ne faut pas s’y aventurer sans un minimum de connaissance et de matériel (gilet, casque...)
La mer peut être dangereuse aussi mais si les règles de base sont respectées (météo, combinaison ou gilet et leash) il y a moins de surprise !
A quel moment as-tu su que cette passion allait devenir plus qu'un hobbie ?
Quand tu t'endors en te disant vivement demain que j’y retourne et quand tes vacances se transforme en “ou puis-je partir SUR mon SUP ?” c’est que le virus est la !
Tu fais de la compétition ?
Oui, bien que cette année j’en ferai très peu. Je vais me limiter aux compétitions en bassin d’eaux vives et en rivière. Cela à un cout les compétions : entre les trajets, l’inscription, l’hébergement... Cette année j’ai décidé de privilégier mes expéditions et mon association qui me permettent de partager cette passion avec un plus grand nombre de personnes et avec mes sœurs de combat.
Peux-tu nous rappeler tes podiums ?
J’ai fais de nombreux podiums lors de Alpine Lake Tour (Courses sur lac en Flat Longues distances) et en SUP Cross et River (Courses en rivières et bassin d’eaux vives comme la Tawara ou les Natural Game). Première femme au Marathon Internationale des Gorges de l’Ardèche et aussi la première femme à avoir réalisé les 130 km de la course mythique appelé La Dordogne Intégrale..
Tes expéditions ?
2015 : L’Islande, terre de feu et de glace. Trek et SUP.
2016 : Défi MED’Ocean : Relier la Méditerranée à l’Océan en SUP. 600km à la force des bras en moins de 10 jours.
2016 : Traversée de la Méditerranée en SUP. Paddle Raid Fréjus/Calvi. 190km en 39h. 2016 : La Dominique et les petites Antilles. Sur les traces des Indiens Arawak. Trek et SUP.
2016 : Traversée de la mer Egée en SUP et les iles du Dodécanèse. 250km en 10 jours.
2017 : Passage forcé à Cancéropolis
2018 : Le Groenland en SUP. De la maison des premières expéditions polaires à la Banquise. 400km en 21 jours.
2018 : Le Groenland. Expédition Kayak en Baie de Disko. 200km en 10 jours.
2019 : Le chemin du bonheur en Haute Maurienne, France. SKI et Pulka.
Est-ce que tu assumes tous les « superlatifs » qui te sont attribués: combattante, aventurière. Aujourd’hui, tu n’es plus une femme « ordinaire »?
J’ai un peu de mal avec ces qualificatifs. Je ne fais rien d’extraordinaire. Je rame, je voyage, je m’aventure, j’explore, je m’amuse et c’est tout ! Quand je rentre de mes expéditions, ma vie reste la même et est la même que tout le monde : je dois faire à manger pour ma tribu, me taper le ménage, amener mes filles à l’école...
Et ce combat contre le cancer je n’ai pas le choix, j’ai deux filles et je m’en occupe seule !
Par contre, oui, je ne suis plus une femme “ordinaire”, j’ai deux seins en moins LOL mais je ne suis malheureusement pas la seule...
Tu as eu un coup de coeur sur le Groenland alors que tu commences à avoir « vu du pays », peux-tu nous en dire plus sur cet endroit? Pourquoi si froid et si loin ?
Les expéditions polaires m’ont toujours fasciné, mais je me disais toujours que cela était...pour les autres. Puis la vie a fait qu’il fallait que je réalise mes rêves avant que cela ne soit plus possible... J’ai vécu aux Caraibes plusieurs années, et j’y ai compris que j’avais du mal à gérer mon corps avec la chaleur alors que le froid ça me ravigote !
La nature sauvage du Groenland offre certains des panoramas les plus spectaculaires et les plus intacts sur la terre. Les eaux polaires, les gigantesques icebergs, le climat, les baleines font ressentir la puissance de la nature. C’est saisissant de beauté, de luminosité. J'y ai connu une quiétude et un apaisement comme jamais je n’ai ressenti auparavant, alors que cette expédition fut certainement la plus engagée de toutes mes aventures.
C’est un spectacle surnaturel et surprenant de beauté.
Tu soutiens la cause féminine et le handicap, comment peut-on aider?
Je ne suis pas féministe mais j’aimerais juste que l’on arrête de dire “Une femme ne peut pas faire ci ou ça !” et le handicap, c’est pareil ! Une maladie, un accident, cela peut arriver à chacun d’entre nous et cela ne doit pas nous empêcher de réaliser nos rêves. Être une femme, un homme, malade, amputé d’un membre, ou même en fauteuil roulant, n’empêche pas de réaliser des choses ou de partir à l’aventure ! Ce qui compte c’est le mental et la détermination.
J’ai créé “AU DELA DE L’OCEAN”. Cette association propose gratuitement aux femmes malades ou en rémission d’un cancer du sein des séances de Stand Up Paddle. Ces séances ont pour objectif de leur montrer que l’on peut faire du sport pendant les traitements, et que cela fait un bien fou (baisse des effets secondaires de la chimio, limitation des récidives...). Et aussi que la mer et la nature font du bien au moral !
Vous pouvez nous aider en adhérent à l’association (Bulletin d’adhésion à télécharger sur la page Facebook page Beyond the Ocean).
Tu es l’une des nouvelles ambassadrices de la marque Saint-Jacques Wetsuits. Peux-tu nous parler de ton attrait pour cette marque ?
J’ai découvert la marque sur l’eau. J’avais repéré quelques surfeurs avec des combinaisons au look un peu décalé : des polos, des marinières, des vestes, dans un style unique.
J’ai été énormément surprise par la qualité du néoprène et par tous les petits détails de fabrication (Et oui, idée plan drague sur un spot de surf : “Je peux toucher ta combi ?” hahaha, mdr)
Et quand j’ai appris que cette marque était française et de Montpellier, c’était la cerise sur le gâteau ! Ou je devrais plutôt dire “C’était l’Aerial sur la vague” !
Où trouves tu de l'inspiration quand tu manques d'énergie où que tu n'as pas le moral ? Qu'est ce qui t'inspires ?
Quand je n’ai pas le moral c’est simple je prends mon SUP et je vais ramer. La nature et la mer me ressourcent. Par contre j’avoue aimer ramer dans les endroits où il y a peu d’êtres humains...le calme et la solitude m’aident beaucoup aussi.
Et quand cela ne va pas, quand j’ai le moral dans les tongs, j’ouvre une Map Monde et je cherche un coin du globe avec une rivière à explorer ! J’ai donc déjà des dizaines de trip déjà ficelés, que je ferais ou pas, mais dans ma tête le voyage a commencé, et ça fait du bien 😉 Et quand cela ne va vraiment mais vraiment pas du tout, c’est au fond du canap avec un pot de glace devant Desperate House Wife...et oui , ça m’arrive aussi !
As-tu un message à faire passer ?
Réalisez vos rêves ! Osez ! La vie est courte et quelques fois peut être encore plus courte que prévue. La maladie ou l’accident cela n’arrive pas qu’aux autres.
Les copines, on pense au dépistage du cancer du sein même avant 40 ans. Et Messieurs si vous voulez garder près de vous les femmes que vous aimez (votre femme, votre mère, vos sœurs, vos copines, vos voisines...) incitez les à se faire dépister !
Quelles sont tes futurs projets?
Je repars au Groenland. En plein hiver les températures sont de –30° environ. La mer est remplacée par la banquise. Cela sera donc à ski et avec une pulka pour transporter mon matériel. Je reprends le même parcours que cet été en SUP mais cette fois ci sur la glace. Une expédition qui va durer un mois, nous serons deux.
Et cet été, une expédition solo en SUP sur la rivière émeraude : la Soca. Sa source se situe en Slovénie et elle termine sa course dans la mer adriatique. Peut-être j’y croiserai un ours brun ;)
Quelle est ta devise ?
Cela sera plutôt une citation. J'aime beaucoup celle-ci de Paul Emile Victor : “ Ce n’est pas ce que nous sommes qui nous empêche de réaliser nos rêves ; c’est ce que nous croyons que nous ne sommes pas.”
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